Le sud-ouest parisien est-il condamné à perdurer dans l’enfer des nuisances sonores sous le sceau du déni de l’État ?
L’aérodrome de Toussus-le-Noble est une aberration : le maintien du trafic non régulé d’un aérodrome d’une telle envergure et de surcroît en pleine expansion dans un environnement fortement urbanisé relève de l’absurde. Ce constat est d’autant plus choquant que la majorité de l’activité relève du loisir. Comment les pouvoirs publics peuvent-ils rester dans l’inaction ?
Pendant des décennies, le trafic s’est stabilisé autour de 115 000 mouvements et l’urbanisation s’est opérée sur cette base. Force est de constater à présent la récente explosion du trafic (+20% entre 2018 et 2019 !) suite à l’accueil des hélicoptères en provenance de Saint-Cyr l’Ecole et d’Issy-Les-Moulineaux, ainsi que l’implantation de l’école de formation AstonFly. Le trafic horaire n’étant pas régulé, c’est une autoroute de tondeuses à gazon qui se dessine au-dessus des habitations de la vallée chaque jour de beau temps, du petit matin jusqu’au soir, la semaine comme le week-end. Qui pouvait anticiper une telle explosion du trafic à Toussus-le-Noble ?
Cerise sur le gâteau, l’école de formation AstonFly, nullement soucieuse de se doter d’avions silencieux, entend bien s’accroître encore cette année. Alors que certains aéroclubs s’équipent depuis plusieurs années d’avions silencieux et électriques, cette école s’implante brutalement avec des avions particulièrement bruyants et ce en pleine expérience Calipso, anéantissant ainsi tous les efforts réalisés par certains usagers vertueux ainsi que les promesses de l’accord usagers/riverains.
Mais ce n’est pas tout ! Le dossier « Toussus » regorge de détails croustillants.
1er « détail » : Cette augmentation de trafic est rendue possible par la marge existante entre l’activité actuelle et le plafond réglementaire fixé à 180000 mouvements par an. Mais ce plafond s’est vu artificiellement boosté en 2000 à l’ombre des regards.
Avant 2000, un départ et une arrivée comptaient pour deux mouvements.
En 2000, la D.G.A.C augmente artificiellement ce plafond par un petit tour de passe-passe. La définition du mouvement pour le « Touch and go » (c’est-à-dire sur les tours de pistes) est alors modifiée : un départ et une arrivée compte désormais pour 1 mouvement ! D’après D.G.A.C., « on passe de 180.000 mouvements ancien décompte à 144.000 nouveau décompte ». La supercherie consiste à maintenir le plafond 180 000 mouvements malgré le changement de définition, permettant ainsi à AstonFly d’augmenter son activité.
Alors que les riverains demandent la régulation du trafic horaire, journalier et annuel, l’Etat fait la sourde oreille et se dérobe face à ses responsabilités.
2e « détail » : Le rapport de la Chambre de Commerce et de l’Industrie de Versailles nous apprend qu’il n’y a pas de contrôleurs aériens à Toussus-le-Noble (TLN) un à deux jours par semaine, alors que TLN est près de devenir le 3e aéroport de France. Ces jours-là les pilotes sont en auto-information, et les riverains bien forcés de leur faire confiance. Ce rapport met en exergue que DGAC peine « à fidéliser ses contrôleurs aériens qualifiés qui, du fait du fort trafic et de la complexité des approches, préfèrent le plus souvent quitter TLN pour travailler sur d’autres plateformes. » Le trafic est bien trop important mais l’État persiste à ignorer ses responsabilités.
3e « détail » : Non-respect des trajectoires, zones bleues à éviter constamment survolées, manœuvres au-dessus des villages non respectueuses des riverains, les pilotes bénéficient visiblement d’un passe-droit pour voler en toute impunité faute de contrôles des autorités compétentes.
Les riverains multiplient les appels à la Gendarmerie des transports aériens mais restent sans réponse puisque, comble de l’absurdité, cette dernière n’a pas accès aux traces radars directement et en temps réel. La Préfecture annonce des contrôles renforcés mais n’en donne pas les moyens à la Gendarmerie. Ainsi, l’État chantonne de belles promesses tout en sachant qu’elles ne pourront être tenues. L’État se dérobe face à ses responsabilités.
4e « détail » : Du fait de la proximité avec l’aéroport d’Orly, les avions sont contraints de voler très bas, à 1500 pieds maximum au-dessus du niveau de la mer (et non au-dessus des habitations !). Les nuisances sonores en sont ainsi décuplées. Comble de l’incohérence, la ville de Gif-sur-Yvette devrait être survolée à 5000 pieds du fait de sa forte densité au regard de la réglementation, Chevreuse à 3300 pieds par rapport au sol. Comment justifier que le point Sierra de passage obligatoire avant atterrissage à TLN (et donc véritable carrefour aérien) soit placé à 1300 pieds au-dessus du niveau de la mer soit environ 895 pieds au-dessus de Gif-sur-Yvette ? Face au non-respect de la réglementation, l’État se dérobe face à ses responsabilités.
5e « détail » : Cela continue ! L’arrêté de 1973 impose que des mesures de bruits soient réalisées plusieurs fois par an dans les villages environnant l’aérodrome afin de constater l’évolution des nuisances sonores sur des journées de trafic représentatif. Loin s’en faut, deux uniques balises de mesure de bruit sont implantées à chaque extrémité de piste à l’aérodrome ! L’État ne respecte pas la réglementation.
Par ailleurs, si les mesures de bruit actuelles annualisées indiquent un niveau de l’ordre de 55 dB, ce chiffre ne reflète en rien le caractère saisonnier, agressif et brutal des nuisances occasionnées les jours de beau temps, ni le stress qui en découle sur la population. Le déni de l’État est total. L’État se dérobe face à ses responsabilités.
Mais où est l’État ? Pourquoi les élus au suffrage universel s’obstinent-ils à privilégier les quelque 1000 pilotes de TLN face aux 116 000 riverains ? Comment expliquer leur silence lors de la dernière Commission Consultative de l’Environnement ? Qui représentent-ils ?
Quel est le poids de l’activité de l’aérodrome offrant quelques centaines d’emploi face aux travailleurs, télétravailleurs, étudiants, à l’ensemble des riverains à la merci de ces nuisances insupportables ?
Devant tous, l’Alliance demande à ce que l’arrêté de 1973 soit respecté :
- Que le plafond soit rétabli à 144000 mouvements pour tenir compte du changement de définition du mouvement pour le touch-and-go
- Que les mesures de bruit soient réalisées dans les villages environnants
L’Alliance réitère également sa demande de régulation du trafic horaire, journalier et annuel afin que TLN ne devienne pas le 3e aéroport de France, et demande des mesures concrètes afin de réduire significativement les nuisances sonores :
- Éviction de l'activité des hélicoptères (hors opérations d'entretien)
- Interdiction des vols touristiques (avions et hélicoptères)
- Horaires de suspension de tous vols, de 12 heures à 16 heures les week-ends et jours fériés entre le 1 er Avril et le 31 Octobre de chaque année
- Interdiction progressive des avions bruyants
- Mise en place de taxes pour les avions bruyants, en vertu de la règle du pollueur payeur
Afin de pousser l’Etat à faire face à ses responsabilités, l’Alliance organise un rassemblement le samedi 12 juin à 10h30 devant l’aérodrome.